Là où Missmath dérive et Weby intègre.

Présenté par Blogger.

Certification certifée ?

Ça y est, j'ai terminé ma correction.
Les résultats sont catastrophiques.
Les deux tiers des élèves échouent.
La catastrophe.
Pourtant, mon examen était facile.








Qu'arrive-t-il maintenant ?

Nous avons tout arrêté. Nous nous sommes assis, nous avons discuté.
Qu'est-ce qu'on fait maintenant ?

- On garde la même note, mais on met l'examen sur 70.
- On change la pondération de l'examen et on met plus de poids sur le final.
- On annule les numéros difficiles.

Étonnamment, personne n'a suggéré le classique travail de reprise. Il faut dire qu'en fin de DEC, la somme de travail est lourde, un travail de plus serait la goutte qui ferait déborder le vase.

***

Arrêtons ici cette tranche de vie, nous avons suffisamment de pain sur la planche pour plusieurs billets et pour continuer la réflexion sur le chemin que Blagu'cuicui a proposé. (Je vous invite donc à retourner lire ses pertinents commentaires laissés deux billets plus tôt ici.)


L'examen était facile


Dixit moi-même, mais l'était-il vraiment ? L'était-il trop ?

Il arrive qu'à force de donner le même cours, on ne voit plus les difficultés. Vous connaissez peut-être la citation célèbre du prof qui, dans la première semaine de cours, se met en colère et crie à ses étudiants de première année :

"Comment se fait-il que vous ne sachiez pas cela, ça fait 10 ans que je l'explique."

L'inverse est aussi vrai. À force de voir des problèmes difficiles, les étudiants perdent leurs moyens devant des problèmes trop faciles.

"Ça ne peut pas être aussi simple que ça, je dois avoir mal compris."

Pour qualifier un examen, il faut avoir des références et ce sont ces références qui nous guident dans la construction des évaluations. Elles sont nombreuses : matière vue en classe, exercices ou travaux préparatoires, problèmes classiques. Que ceux qui n'ont jamais rencontré de robinets qui coulent ou d'enclos à maximiser pour un périmètre de clôture donné se lèvent ! Mais, il existe, plus ou moins fortement (oserai-je écrire hélas) une référence encore plus forte : la certification.

Au Cégep, comme à l'Université, la certification des étudiants naît directement de l'encre rouge de chaque enseignant. La responsabilité est énorme. Les conséquences à un manque de professionnalisme sont énormes pour les étudiants, quasi nulles pour les professeurs.

Au secondaire, comme au lycée, les épreuves ministérielles viennent clore les séquences de cours. La référence à ces épreuves est indéniable dans la préparation aux examens. Je pourrais ici vous raconter les longues et belles discussions que j'ai eues avec ma collègue de chimie lorsque nous enseignions au baccalauréat international. Nous devions préparer les élèves pour les épreuves du B.I., mais en même temps, nous devions couvrir le programme du Cégep pour répondre aux exigences des universités du Québec. La conciliation BI-Université était souvent à nos yeux difficile. Il était donc évident que nos évaluations reprenaient le style de questions du BI, tout comme j'en suis convaincue, les enseignants au secondaire ou au bac reprennent les questions du Ministère. N'est-ce pas normal de préparer un nageur olympique dans une piscine olympique ?



Ainsi, la latitude du style d'évaluation sera largement teintée par les conséquences des évaluations finales. Mais lorsqu'il n'y a pas de conséquence qu'arrive-t-il ?

Il peut arriver n'importe quoi : des changements à la pondération, des changements de notation, l'annulation de numéros...

Mais la situation est plus catastrophique que cela, du moins ici au Québec.

Combien de fois ai=je entendu des enseignants du secondaire dirent que 80 % de leurs élèves ne réussissent pas leur cours et devraient le refaire, mais que l'administration ne tolère pas un tel taux d'échec. Combien de fois ai-je entendu que les évaluations ministérielles avaient été normalisées pour diminuer les taux d'échec ? L'affaire est contagieuse. Un collègue à l'université me disait que sa cohorte X était peu nombreuse et très faible. Que faire ? Les faire échouer et fermer ? Que faire d'une classe qui prend plaisir à ne rien faire ? Ça existe, croyez-moi. On les fait tous échouer ? L'administration ne peut pas supporter cela. Alors, qu'arrive-t-il ?

On passe au suivant !

Mais où s'arrête le suivant ?
Qui arrive pour dire à l'étudiant qu'il n'est pas compétent ?

J'ai un étudiant en calcul avancé qui ne sait pas dériver. Comment a-t-il pu passer son calcul 1 ? Je ne sais pas. Son calcul 2 ? Encore moins. Je serai la méchante qui, à moins d'un miracle, le fera couler. Il aurait dû couler bien avant.

J'expliquais aux élèves, bien assise sur mon bureau que je pourrais trafiquer les notes, changer les pondérations en cachette en leur faveur, normaliser les notes, mais dans les faits, leurs résultats reflètent hélas bien leur compréhension de la matière. Quand je mets 75 % à un étudiant et que celui-ci se voit créditer son cours universitaire, je dois m'assurer qu'il mérite ce crédit, qu'il a atteint les compétences pour poursuivre et qu'il ne sera pas lésé par la suite. Il y a des conséquences aux notes que je donne. Pour eux. Moi, ça ne change rien à ma vie. Je ne suis pas le Père Noël, je ne suis pas là pour leur donner des cadeaux parce qu'ils sont présents à tous mes cours. C'est, à mon avis, une grande preuve de respect et de considération que d'être, envers eux, assez honnête pour ne pas leur faire croire que le Père Noël existe. Pour réussir, il faut être compétent. Minimalement !!!

Les notes sont catastrophiques

J'ai écrit mon évaluation, mais j'ai également écrit ma grille de correction. Certains corrigent très sévèrement, d'autres très largement. Que signifie une note de 30 % ? De 70 % ? Est-ce qu'un 50 % aurait été un 60 % si mon collègue avait corrigé la copie ? Du moins, s'il en avait bâti la grille de correction ? Peut-être aurait-il distribué les points autrement, selon ses références qui ne sont pas les miennes. Peut-être aurait-il eu de meilleurs résultats pour les mêmes copies, peut-être aurait-il eu de pires résultats. Cette relativité est bien embêtante, mais, dans la vie, contrairement au monde mathématique, tout est relatif.




(Comme je sais que quelques uns de mes étudiants ont découvert mon blogue et passent régulièrement le lire, je tiens à préciser, au cas où ils auraient des doutes, que leurs résultats n'auraient pas été significativement meilleurs si l'un ou l'autre de mes collègues avait corrigé leur examen. Lors des révisions de notes, de façon tout à fait objective, il est rare que les notes varient de plus de 5 %. C'est l'avantage des mathématiques sur des disciplines moins "cartésiennes" comme le français ou la philo.)


(Je tiens ici à souligner aux profs de philo et de français qui lisent mon blogue qu'ils ont toute ma considération pour leur immense tâche de correction et d'évaluation tant sommative que formative. Aucun prof ne devrait avoir le droit de se plaindre d'avoir de la correction s'il n'enseigne l'une ou l'autre de ces disciplines.)

4 commentaires

Sonia Geffrier a dit...

Joli billet.
J'apprécie particulièrement la citation "Comment se fait-il que vous ne sachiez pas cela, ça fait 10 ans que je l'explique."
La difficile harmonisation post-examen... En France, un ex-ministre de l'éducation annonçait ouvertement "Je veux que 80% d'une classe d'âge obtienne son bac" et les inspecteurs de s'aligner, en donnant les consignes de correction nécessaires à une telle "réussite" !

Blagu'cuicui a dit...

Sonia tu es loin d'avoir tord et même si les ministres se succèdent, le taux de réussite au bac n'est jamais redescendu au-dessous des 70% si je me souviens bien.

Et encore s'il flirtait plus souvent avec les 70%, il y aurait déjà moins d'échec après celui-ci et surtout le bac aurait une certaine valeur pour trouver un travail ce qui n'est en grande partie plus le cas aujourd'hui.

Comme le dit Missmaths la difficulté réside dans le fait de savoir quand dire à un élève "c'est pas pour toi, faut arrêter". C'est aussi dur à dire qu'à entendre je pense car l'un sait qu'il va changer la vie de l'autre et l'autre sait que sa vie va changer aussi. Mais comment en être sûr qu'il ou elle n'est plus capable de faire?

En effet, on a vu des élève en chute libre une année et revenir au top l'année suivante. Un miracle? Des paramètre qui ont changé? Aucune idée mais cela m'est arrivé il y a quelques années maintenant. Une frayeur du redoublement qui m'a fiat prendre conscience que je gâchais mes capacités. Mais à mon époque il y avait encore cette frayeur du redoublement qui pouvait motiver ou démotiver (les deux aspects sont possibles) alors qu'aujourd'hui qu'en est-il?

Rare sont les élèves qui redouble leur 1ère par exemple et arrive au bac avec un bachotage tel qu'ils arrivent à l'avoir (t'en mieux pour eux c'est pas le soucis à la rigueur) mais après que faire? Le bachotage n'est pas de la reflexion ne soi c'est un conditionnement pour répondre à des types de questions prédéfinies. Mais quand les questions change et quel a difficulté augmente de façon telle que les questions ne sont plus réellement prévisible même par "bachotage"? Et bien c'est la catastrophe et les professeurs crient à l'incompréhension de voir des élèves arriver avec si peu de bagage alors qu'il y a quelques années ce qu'il enseignait était compris tout de suite: "Comment se fait-il que vous ne sachiez pas cela, ça fait 10ans que je l'explique?". Oui mais en 10ans, beaucoup de chose change et les niveau du lycée comme du collège évolue et ainsi après le bac, le constat est souvent dur.

Cordialement,

unautreprof a dit...

La correction maintenant au primaire se fait en regard d'une atteinte de compétence, donc on doit poser un jugement.
C'est "joliment" différent d'un enseignant à l'autre.
En adaptation scolaire, on évalue selon le progrès. Encore là, c'est difficile et l'élève qui fait des efforts et progresse peu aura t-il un 30% (la note la plus faible possible dans notre barême)?

Personnellement, après six ans, je réussis mieux mais ça reste compliqué et je constate que je suis bien plus sévère que la plupart des enseignants...

Sonia Geffrier a dit...

Une autre vidéo de soi-disant perle du bac, sur la racine carrée, cette fois :
http://www.dailymotion.com/video/x5ixrw_perles-du-bac-2008-racine-carree_fun