Là où Missmath dérive et Weby intègre.

Présenté par Blogger.

Langage non-verbal

Ce matin à la radio, une dame parlait de la nouvelle réalité du monde du travail. Pour la première fois, quatre générations de travailleurs doivent cohabiter. Des retraités que l'on engage comme contractuels, des baby-boomers sur le point de prendre leur retraite, des X septiques toujours prêts à changer de job et les Y qui débarquent. La mode est à l'accompagnement, au mentorat.

Dans le reportage qui s'adressait à Monsieur et Madame Tout-le-Monde, la dame disait un peu "neunuchement" :

"Les jeunes de la génération Y sont habitués de faire plusieurs choses à la fois, il ne faut donc pas que les plus vieux se méprennent de les voir être sur leur ordinateur pendant qu'on leur parle. Ils vous entendent très bien tout en faisant autre chose."


Et c'est alors que j'ai compris ce que je n'arrivais pas à m'expliquer !



Histoire d'une révélation



Depuis toujours et pour des raisons que je ne peux pas expliquer, à chaque session, je me retrouve avec des étudiants qui m'adoptent. Ils s'installent dans mon bureau et discutent entre deux cours ou parce qu'ils ont besoin de se confier, de se raconter.

Oh, je ne m'en plains pas. Cette proximité avec les étudiants m'a beaucoup apporté tout au long de ma carrière. C'est mon salaire... enfin le supplément qui ne paie pas l'épicerie, mais qui donne l'énergie pour travailler les soirs et les fins de semaine. Mais... il arrive souvent que je n'aies pas le temps de discuter.

Depuis quelques temps (je dirais 3-4 ans), je constate un changement.

Avant, lorsque je n'avais pas le temps de discuter, je vaquais un peu à mes occupations pendant que les étudiants discutaient, ils comprenaient et me laissaient travailler. Or, depuis quelques années, ça ne marche plus. J'ai beau exagérer (j'ai fait des tests), ils restent là, dans leurs histoires à me parler alors que visiblement je corrige, je lis, je fais du ménage sans les regarder, je fais autre chose, je suis occupée sous leurs yeux de façon hautement évidente. Ils collent. Totalement fascinant.

Ces dernières années, je ne suis pas arrivée à m'expliquer cette génération spontanée d'étudiants qui ne comprennent pas mon langage non verbal pourtant tellement clair... ... pour moi...

Ce matin, j'ai compris.

Si les Y (et pire la génération digitale qui les suit) arrivent à tenir une conversation tout en vaquant à d'autres occupations, ils doivent sans doute s'attendre à la réciproque. Donc le fait que je fasse autre chose pendant qu'ils me parlent leur est tout aussi naturel que si je leur parlais pendant qu'ils sont sur l'ordinateur, par exemple. Il est donc normal qu'ils ne se rendent pas compte qu'ils me dérangent, puisqu'ils ont cette attitude multitâche lorsqu'ils ne sont pas dérangés.

Tout s'explique.
Il ne me reste qu'à apprendre à verbaliser mon non-verbal.

11 commentaires

Sonia Marichal a dit...

Quand les élèves viennent me voir au bureau en fin d'heure et commencent à me parler en étant persuadés que j'intègre tout à la fois alors que je suis en train de remplir leur cahier de texte de classe je leur répond souvent d'une voix métallique : "Je ne suis pas disponible pour le moment, veuillez laisser votre message après le bip !"
En général ils rigolent et comprennent qu'ils peuvent peut-être patienter 36 secondes de plus, pour m'avoir vraiment à l'écoute !

bibconfidences a dit...

Envoie leur un message texte!
Sans blague, plusieurs parents se plaignent que leurs enfants se font greffer des écouteurs sur leurs oreilles... Fais la même chose!

Pierre-Luc a dit...

J'étais comme ça aussi même quand j'étais étudiant. Faut dire qu'en y repensait, j'étais un des premiers gamers si on veut dans la classe aussi.

Je pouvais dessiner pendant que le prof parlait, même me coucher sur le pupitre et les profs se fâchaient.

Pourtant, c'était comme ça que j'étais plus attentif qu'être pogné à fixer le tableau.

Anonyme a dit...

J'avais remarqué ça avec ma fille, pur produit de la génération numérique, mais aussi avec les autres élèves que j'ai côtoyé au cours des dernières années. C'est cette capacité à poursuivre leurs occupations de loisir en même temps que leurs obligations « professionnelles », comme travaux scolaire. C'est assez déstabilisant lorsqu'on s'attend à un plus grand niveau d'attention de leur part. C'est le signe que le monde nous appartient un peu moins à chaque jour.

Missmath a dit...

Et la réciproque ne vous frappe pas ?
Comme dit Sonia, ils vous parlent pendant que visiblement vous êtes concentrés à faire autre chose et non disponible à les entendre parce que vous n'êtes pas si multitâche que ça, ça ne vous arrive pas ?

Le professeur masqué a dit...

Enfants multitâches? Peut-être aussi enfants-rois qui sont habitués à avoir toute l'attention? Pour ce qui est du multi-tâche, encore faut-il que les tâches sont convenablement exécutées, sinon j'appelle cela des enfants dispersés.

J'ai 45 ans, donc un «vieux» et j'ai pris l'habitude de faire deux ou trois trucs en même temps. Dans les formation de profs, j'en suis enrageant...

Missmath a dit...

Bon point, Prof masqué. Bon point.

Mais un enfant-roi qui s'entête à vous raconter ses exploits sur un jeu d'ordinateurs branchés en réseau alors que vous lui tournez le dos pour corriger une pile d'examens ne serait-il pas vexé par si peu de considération ? Et pourtant, non seulement est-il resté jusqu'à ce que je me lève, mais il est revenu le lendemain pour la suite ! À partir de ce moment-là, j'ai arrêté les tests sur le décodage du langage non verbal et j'ai coché : compétence non atteinte.

Depuis, je supporte beaucoup mieux les mouches l'été... et les formations de profs où je n'ai pas encore eu le courage d'apporter ma correction... mais ça ne saurait tarder. Quoique depuis que j'ai découvert les formations en ligne, alors là, ça, c'est bien. J'ai pu tout ranger mon bureau qui était un véritable fouillis pendant un cours en ligne. Il suffit de prétendre ne pas avoir de caméra vidéo et avoir un micro minable qu'on nous supplie de fermer entre les interventions et, hop, le sentiment de perdre son temps disparait.

M'sieur SVP a dit...

Je m'étonne de cet étonnement général...

;o)

Nos gamins sont forcément multi-tâches !

Les cours traditionnels nécessitent qu'ils :
* écoutent le prof ;
* décryptent les hiéroglyphes inscrits au tableau ;
* prennent des notes ;
* rattrapent le pot de blanco qui a roulé sous les pieds du voisin de devant... qui en profite pour papoter ;
* regardent le pion qui passe dans le couloir ;
* contemplent les hirondelles qui se regroupent sur les fils ;
* and so on !

Ils s'attendent donc à ce que nous soyons capables d'en faire autant !
Sauf qu'avec l'âge... ;-(

J'ai déjà décrit mes activités pédagogiques sur mon blog, je ne recommence donc pas ici.
Mais tous mes apprenants disent qu'ils sont crevés en sortant de mon cours : j'essaie de concevoir mes activités pour les capter, les immerger dans le corpus de connaissances dont je vise la transmission.
Ils bossent au rythme de leur compréhension, mais ils bossent, aspirer par le flux des étapes de l'activité.

Cette longue tirade pour rebondir sur les commentaires de Prof Masqué et de MissMath : le multi-tasking est souvent la marque d'un ennui profond...

Blagu'cuicui a dit...

Pour ma part comme dit le professeur masqué, je pense que le multi-tache (discuter avec le voisin tout en écoutant le cours par exemple) est fort peu probable du point de vu de la qualité d'écoute de l'une des taches en cours.

Le multitache lorsque les tache en question ne demande pas une qualité d'écoute et de compréhension, je veux bien mais bon plus, je ne suis vraiment pas convaincu que la nouvelle génération soi les roi du multitache bien fait mais plutôt du "je touche à tout en même temps et j'emmagasine ce que je peux".

Bref, on verra lorsqu'il nous remplacerons après tout xD.

Nick a dit...

Et elle est pire que moi que moi cette personne?
HAHAHA!!

Missmath a dit...

Pouhahaha ! Cher Nick, je t'aurais souvent mis à la porte, mais hélas, tu avais des conversations intéressantes.