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La technique Nado

Il n'est évidemment pas question ici de la technique Nadeau, basée sur trois mouvements qui permet d'être en forme à tout âge ! Il s'agit plutôt d'une pondération établie par mon collègue et ami Nado qui, force est de constater, arrive à faire le compromis entre ce que devrait être l'évaluation de compétences et ce que la "société" (AH !) exige comme formule d'évaluation.

Je m'explique.

Théoriquement, une compétence s'évalue à la fin d'une formation. L'étudiant démontre lors de son évaluation s'il a atteint ou non cette compétence. On est compétent ou on ne l'est pas. Il est ridicule de prétendre être compétent à 80 %, et encore plus de calculer la compétence moyenne d'une classe.

Par contre, pour des raisons humanitaires, il nous est interdit de soumettre nos étudiants à une seule épreuve sommative. Pourquoi ? Parce que nous vivons dans une société capitalissssssse. Pour une grande partie des étudiants, les évaluations formatives sont considérées comme des évaluations facultatives. Pour qu'ils travaillent, pour qu'ils avancent, il faut que ça paie, donc il faut que le travail compte. Les notes sont le salaire de l'étudiant. Si ça ne compte pas, ils ne le font pas. Ils ne sont pas bénévoles, même si dans les faits, ils travaillent tous à leur compte. Mais ne lançons pas trop vite la pierre aux étudiants, les profs ne sont guère mieux. Pour certains, une seule évaluation sommative serait considérée comme une seule évaluation. Finie la correction, les soirées et les fins de semaine gâchées, voilà pour un prof l'équivalent d'une belle augmentation de salaire.

C'est donc pour cela qu'il existe une politique institutionnelle des apprentissages qui stipule que les élèves doivent avoir au moins X évaluations sommatives au cours de la session. Bref, les réformes passent, le calcul des notes finales restent.

Or, il peut se produire avec cette façon de faire deux injustices graves que la technique Nado combat tout en étant juste pour les étudiants sans cheminement particulier que je qualifierai de constants.

La technique Nado consiste simplement à mettre une pondération variable et proportionnelle sur l'évaluation finale tout en lui accordant un poids minimal élevé.

(Je précise que le département de Monsieur Nado n'est pas soumis à la politique du double seuil de réussite ni aux examens de reprise.)

Exemple : La pondération de l'évaluation finale sera au minimum de 50 % et elle sera proportionnelle à la note de l'évaluation finale.

Considérons un étudiant qui est constant dans ses apprentissages :



Cet étudiant aura un résultat "constant" quelque soit la pondération. La méthode Nado ne l'affecte donc pas trop.

Considérons un étudiant qui commence la session avec de bons résultats et qui stagne sur place pour le reste de la session.




Cet étudiant, pourrait à force de ramasser des points ça et là réussir à passer le cours sans atteindre la compétence, en coulant l'épreuve synthèse. Mais, si l'évaluation finale a un poids important, s'il échoue l'épreuve synthèse, il pourra difficilement réussir son cours.

Finalement, imaginons cet étudiant qui commence avec difficulté le cours, mais qui, à force de travail et d'investissement, réussit à nager suffisamment pour atteindre la compétence.



Cet étudiant, grâce à la méthode Nado, ne sera pas pénalisé par ses premiers échecs. Au contraire, s'il termine l'épreuve synthèse avec 100 %, cette évaluation comptera pour 100 % de sa note finale et il aura donc un 100 % bien mérité, puisqu'à cette évaluation, il aura démontré qu'il a atteint tous les critères de performance de la compétence.

Certification certifée ?

Ça y est, j'ai terminé ma correction.
Les résultats sont catastrophiques.
Les deux tiers des élèves échouent.
La catastrophe.
Pourtant, mon examen était facile.








Qu'arrive-t-il maintenant ?

Nous avons tout arrêté. Nous nous sommes assis, nous avons discuté.
Qu'est-ce qu'on fait maintenant ?

- On garde la même note, mais on met l'examen sur 70.
- On change la pondération de l'examen et on met plus de poids sur le final.
- On annule les numéros difficiles.

Étonnamment, personne n'a suggéré le classique travail de reprise. Il faut dire qu'en fin de DEC, la somme de travail est lourde, un travail de plus serait la goutte qui ferait déborder le vase.

***

Arrêtons ici cette tranche de vie, nous avons suffisamment de pain sur la planche pour plusieurs billets et pour continuer la réflexion sur le chemin que Blagu'cuicui a proposé. (Je vous invite donc à retourner lire ses pertinents commentaires laissés deux billets plus tôt ici.)


L'examen était facile


Dixit moi-même, mais l'était-il vraiment ? L'était-il trop ?

Il arrive qu'à force de donner le même cours, on ne voit plus les difficultés. Vous connaissez peut-être la citation célèbre du prof qui, dans la première semaine de cours, se met en colère et crie à ses étudiants de première année :

"Comment se fait-il que vous ne sachiez pas cela, ça fait 10 ans que je l'explique."

L'inverse est aussi vrai. À force de voir des problèmes difficiles, les étudiants perdent leurs moyens devant des problèmes trop faciles.

"Ça ne peut pas être aussi simple que ça, je dois avoir mal compris."

Pour qualifier un examen, il faut avoir des références et ce sont ces références qui nous guident dans la construction des évaluations. Elles sont nombreuses : matière vue en classe, exercices ou travaux préparatoires, problèmes classiques. Que ceux qui n'ont jamais rencontré de robinets qui coulent ou d'enclos à maximiser pour un périmètre de clôture donné se lèvent ! Mais, il existe, plus ou moins fortement (oserai-je écrire hélas) une référence encore plus forte : la certification.

Au Cégep, comme à l'Université, la certification des étudiants naît directement de l'encre rouge de chaque enseignant. La responsabilité est énorme. Les conséquences à un manque de professionnalisme sont énormes pour les étudiants, quasi nulles pour les professeurs.

Au secondaire, comme au lycée, les épreuves ministérielles viennent clore les séquences de cours. La référence à ces épreuves est indéniable dans la préparation aux examens. Je pourrais ici vous raconter les longues et belles discussions que j'ai eues avec ma collègue de chimie lorsque nous enseignions au baccalauréat international. Nous devions préparer les élèves pour les épreuves du B.I., mais en même temps, nous devions couvrir le programme du Cégep pour répondre aux exigences des universités du Québec. La conciliation BI-Université était souvent à nos yeux difficile. Il était donc évident que nos évaluations reprenaient le style de questions du BI, tout comme j'en suis convaincue, les enseignants au secondaire ou au bac reprennent les questions du Ministère. N'est-ce pas normal de préparer un nageur olympique dans une piscine olympique ?



Ainsi, la latitude du style d'évaluation sera largement teintée par les conséquences des évaluations finales. Mais lorsqu'il n'y a pas de conséquence qu'arrive-t-il ?

Il peut arriver n'importe quoi : des changements à la pondération, des changements de notation, l'annulation de numéros...

Mais la situation est plus catastrophique que cela, du moins ici au Québec.

Combien de fois ai=je entendu des enseignants du secondaire dirent que 80 % de leurs élèves ne réussissent pas leur cours et devraient le refaire, mais que l'administration ne tolère pas un tel taux d'échec. Combien de fois ai-je entendu que les évaluations ministérielles avaient été normalisées pour diminuer les taux d'échec ? L'affaire est contagieuse. Un collègue à l'université me disait que sa cohorte X était peu nombreuse et très faible. Que faire ? Les faire échouer et fermer ? Que faire d'une classe qui prend plaisir à ne rien faire ? Ça existe, croyez-moi. On les fait tous échouer ? L'administration ne peut pas supporter cela. Alors, qu'arrive-t-il ?

On passe au suivant !

Mais où s'arrête le suivant ?
Qui arrive pour dire à l'étudiant qu'il n'est pas compétent ?

J'ai un étudiant en calcul avancé qui ne sait pas dériver. Comment a-t-il pu passer son calcul 1 ? Je ne sais pas. Son calcul 2 ? Encore moins. Je serai la méchante qui, à moins d'un miracle, le fera couler. Il aurait dû couler bien avant.

J'expliquais aux élèves, bien assise sur mon bureau que je pourrais trafiquer les notes, changer les pondérations en cachette en leur faveur, normaliser les notes, mais dans les faits, leurs résultats reflètent hélas bien leur compréhension de la matière. Quand je mets 75 % à un étudiant et que celui-ci se voit créditer son cours universitaire, je dois m'assurer qu'il mérite ce crédit, qu'il a atteint les compétences pour poursuivre et qu'il ne sera pas lésé par la suite. Il y a des conséquences aux notes que je donne. Pour eux. Moi, ça ne change rien à ma vie. Je ne suis pas le Père Noël, je ne suis pas là pour leur donner des cadeaux parce qu'ils sont présents à tous mes cours. C'est, à mon avis, une grande preuve de respect et de considération que d'être, envers eux, assez honnête pour ne pas leur faire croire que le Père Noël existe. Pour réussir, il faut être compétent. Minimalement !!!

Les notes sont catastrophiques

J'ai écrit mon évaluation, mais j'ai également écrit ma grille de correction. Certains corrigent très sévèrement, d'autres très largement. Que signifie une note de 30 % ? De 70 % ? Est-ce qu'un 50 % aurait été un 60 % si mon collègue avait corrigé la copie ? Du moins, s'il en avait bâti la grille de correction ? Peut-être aurait-il distribué les points autrement, selon ses références qui ne sont pas les miennes. Peut-être aurait-il eu de meilleurs résultats pour les mêmes copies, peut-être aurait-il eu de pires résultats. Cette relativité est bien embêtante, mais, dans la vie, contrairement au monde mathématique, tout est relatif.




(Comme je sais que quelques uns de mes étudiants ont découvert mon blogue et passent régulièrement le lire, je tiens à préciser, au cas où ils auraient des doutes, que leurs résultats n'auraient pas été significativement meilleurs si l'un ou l'autre de mes collègues avait corrigé leur examen. Lors des révisions de notes, de façon tout à fait objective, il est rare que les notes varient de plus de 5 %. C'est l'avantage des mathématiques sur des disciplines moins "cartésiennes" comme le français ou la philo.)


(Je tiens ici à souligner aux profs de philo et de français qui lisent mon blogue qu'ils ont toute ma considération pour leur immense tâche de correction et d'évaluation tant sommative que formative. Aucun prof ne devrait avoir le droit de se plaindre d'avoir de la correction s'il n'enseigne l'une ou l'autre de ces disciplines.)

Mathématique de Павлов






Ça fait quelques sessions déjà que je fais cette expérience sadique qui cache quelque chose de terrible.

Il est évident que les étudiants fonctionnent en mode économie d'énergie. Leur travail d'étudiant est, pour la plupart, un travail. Les meilleurs font ce qui leur est demandé, mais rarement plus. La plupart tente d'en faire le moins possible. Normal, il y a tant à faire.

Je suis par contre fascinée par les réflexes pavloviens qu'ils développent et en examen, ils réagissent comme des chiens.

La question est : pourquoi.

Je m'explique.

Pendant tout le secondaire, ils travaillent la parabole sous toutes ses formes, même les plus tordues, les plus inutiles. Ils arrivent au Cégep, apprennent les techniques de graphes et d'optimisation et psssssss... la parabole est oubliée. C'est à peine s'ils ne nous sortent pas la méthode de Newton pour estimer ses zéros alors qu'ils ont la formule quadratique gravée presqu'aussi profondément que le théorème de Pythagore.

En calcul avancé, où l'on s'amuse à trouver des aires et de volumes tordus, c'est mon classique : je leur demande en examen de calculer l'aire d'un triangle. 99 % de ces futurs ingénieurs la trouvent avec une intégrale double. Les autres n'y arrivent tout simplement pas. Pathétique n'est-ce pas ? Mais quelle leçon de vie !

Cette semaine, j'ai demandé une interpolation linéaire trop réduite : à 11 h, il y a 30 litres dans un réservoir, à 11 h 10, il y en a 40. Par interpolation linéaire, estimez combien il y en avait à 11 h 05. Les étudiants ont figé.


"Madame, je ne comprends pas."


On tente de prendre les étudiants là où ils sont, puis on complexifie, on monte la théorie, on complexifie encore, et encore. À la fin d'une étape, il n'est pas rare qu'on lance des défis, des questions plus difficiles. Idéalement, toute la classe devrait pouvoir y répondre, mais on a déjà perdu des étudiants qui eux se limiteront à retenir le nécessaire pour pouvoir passer...

Alors, quand arrive l'évaluation, comme un stimulus extérieur, l'étudiant veut appliquer la matière sur laquelle porte l'évaluation et il s'attend à ce qu'un examen, du moins en mathématique, soit rempli de défis et de colles à surmonter, de pièges éviter. (Normal, le cours est ainsi monté.) Et survient un problème trop facile, tout à coup, c'est la panique :

"C'est trop facile, ça ne peut pas être que ça, il y a quelque chose que je ne comprends pas, une subtilité se cache et je ne la vois pas..."

Alors, il laisse la question en blanc...

Mais vous voulez savoir ce qui me fait jubiler le plus ? En général, ce sont les étudiants chauffeux des programmes contingentés, ceux qui développent tous les réflexes conditionnels, ceux qui savent actionner tous les boutons pour avoir leur pâtée, ce sont eux qui ne voient pas le bol gratuit qui leur est présenté dans l'autre coin de leur cage.

Voyez-vous le côté pathétique de l'affaire ?
Ils apprennent peu, ils développent des réflexes... comme des chiens...






Ce qui me rassure dans l'affaire, c'est qu'une fois hors de l'école, quand ils devront trouver la surface d'un triangle, ils reviendront naturellement à la bonne vieille formule Base * Hauteur / 2.




П : P
а : A
в : V
л : L
о : O
в : V