Là où Missmath dérive et Weby intègre.

Présenté par Blogger.

Appel à tous - Traduction



Chers lecteurs et chères lectrices,

J'ai troqué cette session mon cours de Statistique* contre un cours de Géomatique et comme je dois monter le matériel didactique, je me retrouve avec des termes anglais dont je ne trouve pas l'équivalent en français. Je peux les traduire librement, mais il doit bien exister des termes mathématiques officiels en français. Je fais donc appel à vous.

Comment traduire "spherical lune".


Comment traduire "spherical colunar triangles" ?

Merci par avance !



* C'est pour cela, chère Élise, que je ne t'ai pas encore écrit. Mais, diantre, que les oreilles doivent te bourdonner, je pense tellement à toi.

Factorisation




L'histoire se passe dans un Cégep près de chez vous.
La situation serait généralisée.


- Monsieur, d'où vient le 7 ?
Et quand Monsieur répond que 3*7 = 21 de grands yeux incrédules s'ouvrent.
Wow, le Monsieur arrive à calculer 3*7 sans calculatrice.
C'est impressionnant.

- Madame, comment on fait pour trouver le 9 et le 8 pour factoriser l'expression quadratique ?
- Tu n'as pas le programme FACTO dans ta calculatrice, répond son collègue.
- La calculatrice programmable est interdite dans mon cours, rétorque la Madame.


Évanouissement des élèves.

Depuis leur premier jour d'école, ces élèves ont une calculatrice entre les mains.
Avec le renouveau, on les a habitué à des problèmes concrets et comme dans la vraie vie rien n'est vraiment arrangé, les "beaux" nombres ont été rares sur leur parcours. Du temps où j'étais jeune et jolie, dans un cours de mathématique quand une résolution amenait un x = 23,434 36, on avait l'assurance qu'une erreur s'était glissée quelque part. Aujourd'hui, c'est le contraire. C'est x=8 qui fait sursauter. Ou pire : x=0. Impossible, trop simple.

Après avoir passé les 11 premières années de leur formation avec une calculatrice de plus en plus sophistiquée dans leur main, voilà que nous considérons qu'une fois arrivés au Cégep, le miracle se produira et nos petits réformés sauront calculer sans béquille.

La question se pose.

Si le secondaire permet la calculatrice programmée pour factoriser des expressions quadratiques, pourquoi l'interdisons-nous ?

À quoi cela sert-il de factoriser ?

Trouver les zéros ? Simplifier une expression ?

Il existe des programmes pour faire cela.

Pourquoi interdit-on ces outils au niveau post-secondaire ?
N'est-ce pas le monde à l'envers ?

Ne serait-il pas plus logique d'interdire la calculatrice au primaire le temps que les enfants apprennent leur arithmétique, puis ne permettre que la calculatrice scientifique au secondaire le temps que les jeunes apprennent bien leur algèbre, puis arriver avec les programmes et les logiciels pour éviter les calculs fastidieux et mécaniques au niveau post-secondaire ?

Est-ce plus logique ou plus conforme à ce que l'on a connu ?




Weby a commencé ses cours de conduite.

On lui a d'abord appris le code de la route.
Puis, on lui a expliqué comment fonctionne le moteur d'une voiture. L'injection, le radiateur, le différentiel. Le rôle des différents liquides. On lui a donné comme premier exercice le changement d'un pneu. Ensuite, comment changer le filtre à air et effectuer le changement d'huile. Son prochain cours portera sur le système de freinage, comment vérifier les plaquettes, entre autre.

Non, non, ce n'est pas un cours de mécanique automobile, c'est bien un cours de conduite. Son prof dit que les élèves apprennent beaucoup plus facilement comment se comporter dans un virage lorsqu'ils savent comment fonctionne le différentiel. Ils mesurent mieux leur distance de freinage quand ils connaissent la mécanique que cela implique. Et puis après, quand ils ont leur propre voiture, ils sont vraiment plus autonomes que les conducteurs venant des autres écoles. Ils peuvent effectuer des réparations sur leurs véhicules et ils ne se font pas rouler par les garagistes.

Elle ne fréquente certainement pas l'école de conduite la plus populaire. Les jeunes ne veulent qu'une chose : avoir leur permis au plus vite pour pouvoir prendre la route. Mais c'est la meilleure formation qui soit. La seule d'ailleurs qui devrait être prescrite par la SAAQ.

1/2 + 1/4 = 1/8

C'est François Guité qui citait une de ses étudiantes :

"Je croyais que j'étais intelligente, puis j'ai découvert les maths."

Hier, je discutais à l'épicerie avec une maman dont la fille est en 5e secondaire :

"Ma fille se tient avec une dizaine d'amies, eh bien elle est la seule à faire des mathématiques de cinquième secondaire. Est-ce que c'est normal ?"

Et pendant ce temps-là, je pense à l'algèbre improvisée de mes étudiants



ou à celui-là qui le plus sérieusement du monde a affirmé dans son examen que

1/2 + 1/4 = 1/8.




Flaubert disait : "Il ne sert à rien à l'homme de gagner la lune s'il vient à perdre la Terre."

Il ne sert à rien de bourrer les programmes de mathématique au secondaire si les élèves perdent jusqu'au sens des opérations élémentaires.

Arrimage difficile

"Avancez en arrière."

Avec l'arrivée des réformés au Cégep, le MELS a décidé que c'était le tour du Cégep de se faire pousser dans sa "logique" du renouveau en moulant nos cours de mise à niveau non pas aux programmes vers lesquels ils mènent, mais en cohérence avec le programme du secondaire.

Le Renouveau, en théorie


On commence à apprivoiser les trois nouveaux profils mathématiques au secondaire :

CST (Culture, société et technologie) : Axé sur la vie sociale, ce profil fera davantage appel à la statistique et aux mathématiques discrètes. On veut préparer les élèves à poursuivre dans le domaine des arts, de la communication ou des sciences humaines et sociales.

TS (Technico-sciences) : Pour les « bidouilleux », les manuels, les ingénieux, ce profil met l’accent sur les études de cas, l’aptitude à repérer les erreurs, à établir des diagnostics, à dégager des processus mathématiques liés au fonctionnement ou à l’utilisation d’instruments liés à certaines techniques.

SN (Sciences naturelles) : Pour les intellos, ce profil ressemble le plus à notre approche traditionnelle au Cégep. On met l’accent sur la compréhension, on amène l’élève à élaborer des preuves ou des démonstrations et on pousse sa capacité d’abstraction (propriétés, théorèmes). L’accent est mis sur la recherche et l’analyse. Cette voie est intentionnellement tracée par le MELS pour la recherche théorique, donc sciences de la nature.

Si ces profils ont des approches et des contenus différents, les évaluations reposent sur les trois mêmes compétences tout au long de la formation (de la maternelle au 5e secondaire).

C1 : Résoudre une situation-problème
C2 : Déployer un raisonnement mathématique
C3 : Communiquer à l’aide du langage mathématique.

En troisième secondaire, les élèves vivent un tronc commun augmenté par rapport aux anciens programmes de 50 heures d’algèbre. Puis, selon ses intérêts et ses affinités, l’élève est appelé à la fin de sa première année du deuxième cycle du secondaire à choisir un des trois profils.

Si une école est trop petite pour offrir les trois profils, les commissions scolaires sont obligées par le MELS d’offrir les trois profils, quitte à changer des élèves d’école selon leur choix.

Le Renouveau, en pratique

Pour maintes raisons administratives ou simplement pratiques, le profil à la carte, selon les intérêts des élèves, ne se fait pas et ce sont la plupart du temps les notes qui déterminent le profil des élèves. Les plus faibles en mathématique seront directement envoyés en CST, sans passer GO, même s’ils rêvent de devenir techniciens ou astrophysiciens. Dans certaines écoles, on exigera au moins 75 % pour entrer dans les profils TS ou SN. Parallèlement, l’élève humaniste qui aura choisi les études du programme international, par exemple, ne pourra probablement pas choisir le profil CST et sera directement envoyé en SN (ou, dans certaines écoles, en TS).

Il faut également réaliser que l’évaluation des compétences amène lors des évaluations un niveau de complexité qui dépasse largement les techniques de résolution. Les épreuves finales ministérielles ne demanderont pas à l’élève de trouver le sommet d’une parabole donnée ou de trouver ses zéros. On préférera lui donner une situation de problème complexe dans lequel joueront plusieurs concepts. L’élève devra réaliser que pour résoudre le problème, il doit d’abord, entre autres choses, trouver le sommet, puis trouver les zéros.

Comme je le disais dans un précédent billet, on ne se situe plus au niveau de la technique, mais au niveau de l'analyse, voire de la synthèse. On pourrait donc s’attendre à recevoir des élèves beaucoup plus forts qu’avant, habitués à vivre de vrais examens synthèses.

Mais l’approche pédagogique du renouveau n’est pas miraculeuse et certains élèves n’arrivent pas à atteindre de si hauts niveaux de complexité dans tous les domaines et à la vitesse imposée par le MELS. Pour ne pas nuire à la réussite des élèves, on aura donc les premières marches de l’évaluation fort généreuses et d’année en année, des élèves seront « pelletés » en avant… jusqu'à obtenir leur DES et se retrouver dans nos classes du Cégep.

Et il arrive qu'entre 15 et 17 ans les jeunes changent d'avis et réalisent qu'ils leur manquent les préalables mathématiques pour entrer dans le nouveau programme de leur choix.

C’est à la dernière minute que le MELS a réalisé que le Cégep devait émettre des préalables pour ses programmes et que le profil SN, réservé pour Sciences de la nature, était bien maigre s’il fermait la porte à toutes les techniques. On a donc en catastrophe tenté de rendre les profils TS et SN équivalents. Or, si TS-5 est désormais équivalent à SN-5, il n’en est rien pour TS-4 et SN-4. Heureusement, les techniques qui ont comme préalables des mathématiques de 4e secondaire ont également des premiers cours de mathématique qui reprennent les notions vues au secondaire.

La mise à niveau au Cégep, en théorie

En enterrant nos vieux cours, le MELS a créé en mathématique 4 nouveaux cours de mise à niveau au Cégep.

201-012-50 : Mise à niveau pour CST4. Offert aux étudiants qui pourraient être admis sans D.E.S. ou des anciens étudiants qui ont eu le DES du temps où il était possible de l’obtenir sans mathématique.

201-013-50 : Mise à niveau pour TS4.
(2-2-2) Le MELS précise : ce cours a été conçu en tenant compte du type de clientèle attendue soit des élèves maîtrisant les contenus de la séquence CST4.

201-014-50 : Mise à niveau pour CST5.

201-015-50 : Mise à niveau pour TS5.
(4-2-4) Le MELS précise : ce cours a été conçu en tenant compte du type de clientèle attendue soit des élèves maîtrisant les contenus de la séquence TS4 ou SN4.

Premier constat, le MELS a négligé le profil SN dans ses cours de mise à niveau. La raison en est fort simple : aucun programme n’a comme préalable le SN4 et le SN5 est équivalent au TS5. Comme le profil TS a été bâti pour les élèves ayant un profil technique, il est tout à fait logique que le MELS ait choisi cette séquence.

Notre Cégep a choisi d’offrir le 015 et, pour encourager nos nombreux programmes en difficulté, le 013. C’est, notons-le bien, la première fois que le Cégep offre un cours de 4e secondaire et nous en sommes bien déroutés.

Conformément à l’optique du MELS, les plans cadres de nos cours de mise à niveau ont rattaché aux critères de performance les contenus du programme de formation. Nos cours de mise à niveau sont équivalents aux cours du secondaire.

La mise à niveau au Cégep, en pratique

Comme il fallait s’y attendre, le 013 s’avère chez nous une mission impossible. La réalité de la pratique frappe le mur de la théorie. Nous accueillons les élèves les plus faibles qui ont reçu une formation plus axée vers les statistiques et les mathématiques timides discrètes et nous devons en 60 heures réussir à leur donner la formation pour laquelle les écoles secondaires ne les ont pas jugés capables de faire en 150 heures.

Et remarquons bien les précisions du MELS : « ces cours s’adressent à des élèves qui maîtrisent les préalables ». Un élève qui ne fait que passer maîtrise-t-il le cours ?

Mais ce n’est pas tout.

En supposant que l’on arrive à arrimer le renouveau pédagogique à nos cours, il restera encore pendant plusieurs sessions des élèves qui arriveront de l’éducation aux adultes (où le renouveau ne sera pas en application avant 2 ou 3 ans) et des élèves qui nous arriveront de l’ancien programme avec des profils 416, 426, 514, profils qui sont plus ou moins comparables aux nouveaux profils, si on exclut la force des élèves qui les habitent.

Mais ce n'est pas tout.

Comme le secondaire met désormais l'emphase sur l'analyse, dans certaines écoles, les techniques de résolution sont informatisées. Les écoles fournissent à leurs élèves des calculatrices programmables bourrées de programmes permettant par exemple de factoriser, de trouver les zéros, de calculer des distances, de donner les mesures d'un triangle quelconque, calculer les statistiques d'une série de données. Or chez nous, au Cégep, les programmes qui permettent la calculatrice programmable font exception. Doit-on alors dans nos cours de mise à niveau faire apprendre aux élèves toutes ces techniques qu'ils auraient dû apprendre au secondaire ? Oui ? Il faut alors repartir des tables de multiplication que ces élèves ne connaissent pas, passer par l'art de mettre sous le même dénominateur, l'algorithme de division... mais au fond, pourquoi ?

La logique du MELS

La réforme a commencé au Cégep dans les années 90. Puis, en 2000, elle commençait au primaire.

Au Cégep, outre la rédaction des plans cadres qui a été dans les premiers temps une véritable blague tant on n'avait aucune idée de ce qu'il fallait y faire et l'approche programme qui nous a donné de belles occasions de nous entretuer entre disciplines, l'approche par compétences s'est traduite dans les faits par l'unique changement des mots "objectifs" par "compétences". Certains cours n'ont pas changé d'un iota.

Pourquoi ? Parce qu'ils étaient parfaits comme ils étaient ou parce que la nature humaine n'aime pas le changement ?

Si c'est parce qu'ils étaient parfaits, alors la tâche sera lourde dans les cours de mise à niveau.

Si c'est parce que la nature humaine a horreur du changement, le temps est venu de s'y mettre.

Supposons qu'on s'y mette

Dans ce cas, la résolution de situation de problèmes devient le coeur de l'enseignement, le prétexte à la communication et au développement de raisonnement mathématique.

Mais...

Le premier cours de mathématique des programmes techniques est en général un cours révisant les notions du secondaire en les appliquant spécifiquement au programme. Les énoncés de compétence sont explicites :

Appliquer les mathématiques dans des situations liées à ... (nom du programme).


À ce compte-là, les cours de mises à niveau en mathématique permettant d'entrer dans un programme seront plus difficiles (car plus étendus) que les cours de mathématique du programme. Étrange, non ?

Pourquoi, par exemple, imposer à un étudiant de géomatique d'apprendre à factoriser des polynômes ou de résoudre des fonctions rationnelles, exponentielles ou logarithmiques alors que dans sa formation, il utilisera de son cours de mise à niveau que les éléments de trigonométrie dont le chapitre entier sera repris dans son cours de Trigonométrie ?

Alors peut-être faudrait-il pousser plus loin dans les cours du programme. Mais ce n'est pas l'intention du MELS quand on regarde les critères de performance qu'il prescrit dans les cours des programmes qui, eux, sont inchangés.

Et l'université dans tout cela


Le Cégep est le relais entre le secondaire et l'université. L'université a-t-elle changé sa façon de faire des mathématiques ? Si oui, il est donc impératif que le Cégep le fasse aussi. Sinon, il est impératif que le Cégep inculque aux élèves la façon traditionnelle de faire des mathématiques et dans ce cas, non seulement doit-on donner nos cours (qui sont bien chargés), mais en plus devons-nous changer la façon dont les élèves ont l'habitude de faire des mathématiques. Dans un cas comme dans l'autre, le Cégep doit changer sa façon de faire.

Conclusion

Peu importe l'angle d'analyse de la situation, on trouve quelque chose qui ne fonctionne pas. Et pourquoi ça ne fonctionne pas ? Parce que la théorie est trop différente de la pratique. Parce que les références historiques sont très fortes et que le manque de ressources nous fait s'y agripper comme à un câble de survie.




Image : La boîte de Pandore, J.W. Waterhouse

Petite fleur


J'ai toujours été bien fatigante, mais cette session, je n'ai pas su intervenir dans plusieurs urgences se présentant les vendredis. J'ai donc à plusieurs reprises envoyé des courriels de panique à des adjoints à la direction, des professionnels du cheminement scolaire, des conseillers pédagogiques. J'espérais recevoir leurs réponses rapides dès le lundi matin.

Eh bien, à chaque fois depuis le mois d'août, les réponses sont arrivées durant la fin de semaine, souvent quelques heures seulement après l'envoi de mon courriel.

Il y en a même un qui a pris la peine de rejoindre par téléphone une de mes étudiantes pour la rassurer sur sa situation.

Comme il arrive que certains d'entre eux passent ici "nourrir les poissons", je me permets de leur laisser ce billet comme une petite fleur qu'ils méritent bien.


(Méfiez-vous tout de même, le pot pourrait suivre !)

École du futur ?



Regroupement d'étudiants en panique à la veille d'une évaluation.

"On ne comprend rien."


Ils trouvent un enseignant disponible à les aider et c'est dans le fond d'un laboratoire désaffecté qu'ils s'installent.

"Tous à vos tablettes, on partage une session."

La révision commence, les exercices, les notes s'écrivent simultanément sur toutes les tablettes électroniques. Les échanges se font. Tous participent. Chacun sur sa tablette, tous sur le même document. Tout est enregistré.

Tous pour un et un pour tous.

Trois étudiants arrivent après une heure.

"Nous avions un cours, on n'a pas pu arriver avant."

"Joignez-vous à la session, voilà l'adresse."


Et voilà, ils ont toutes les notes et toutes les explications de l'heure manquée.

École du futur ?

Non, cela s'est passé ce matin chez nous en technique de génie électrique.



Image : À l'école, Villemard 1910 (exposition bnf)